Le collagène, composant principal de la matrice extracellulaire de la peau, peut devenir pathologique s’il est en excès. Cependant, appliquer un champ électrique sur la peau impacte les voies de régulation du collagène, permettant ainsi transitoirement de diminuer sa production et d’augmenter sa dégradation. C’est ce que viennent de mettre en évidence des chercheuses du laboratoire Softmat, en collaboration avec d’autres laboratoires et universités. Publiés le 21 octobre 2021 dans le Journal of Investigative Dermatology, ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives thérapeutiques pour le traitement local des fibroses cutanées caractérisés pas un excès de collagène.
Lorsqu’un champ électrique est appliqué autour d’une tumeur, celui-ci « perméabilise » localement et temporairement les cellules. Cette perméabilisation permet d’assurer, par exemple, l’entrée massive de molécules anticancéreuses dans les cellules et les tissus, ce qui favorise la diminution des doses injectées aux patients et limite les effets secondaires : c’est l’approche de l’électrochimiothérapie, utilisée depuis les années 1980 en milieu hospitalier pour traiter les tumeurs cutanées.
De façon intéressante, les médecins utilisant cette méthode ont observé, tout comme les patients eux-mêmes, une guérison esthétique et fonctionnelle des sites ainsi traités. Cependant, les mécanismes à l’œuvre derrière cette observation n’avaient jamais été élucidés.
Laure Gibot, Sara Gouardères et Patricia Vicendo, de l’équipe IDeAS, ont utilisé un modèle de peau synthétique très sophistiqué, notamment utilisé pour soigner les grands brûlés. Ce modèle de peau artificielle présente l’avantage d’être riche en
matrice extracellulaire, comparable à la peau humaine en termes de composition et d’organisation. Cette matrice est majoritairement constituée de collagène, bien connu en cosmétique pour son rôle
dans les propriétés mécaniques de la peau. Ce dernier, comme l’ensemble de la matrice, est finement régulé notamment via sa dégradation par des enzymes spécialisées qui empêchent qu’il soit en excès.
Si cet équilibre est perturbé, la matrice devient pathologique, comme c’est le cas pour les cicatrices fibrotiques ou hypertrophiques, caractérisées par une production excessive de collagène.
Grâce à ce modèle de peau artificielle, les scientifiques ont montré que l’application d’un champ électrique sur la peau joue sur de nombreux gènes qui influencent la production et la maturation de collagène. La production de ce dernier est ainsi diminuée dès quatre heures après l’application du champ électrique et ceci pendant plusieurs jours. De plus, les enzymes qui dégradent le collagène ont leur activité augmentée pendant au moins 48 heures.
L’application d’un champ électrique sur la peau présente donc un fort potentiel pour une future utilisation thérapeutique dans le traitement de la fibrose cutanée.
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