La fibre de carbone fait partie intégrante de nombreuses industries de premier plan (aéronautique, automobile, éolien). Ce matériau structural est réputé pour ses performances mécaniques, alliées à une légèreté sans pareille. Seul bémol, sa production passe majoritairement par l’usage de produits de synthèse issus du pétrole, dont la transformation consomme énormément d’énergie. En partenariat avec le CIRIMAT, l’équipe SMODD a collaboré avec l’entreprise Expleo afin de mettre au point un procédé à faible impact environnemental, permettant de recycler des composites à base de fibres de carbone et de résine époxys utilisés en structure primaire d’avion. Écologique et peu couteuse en énergie, cette nouvelle méthode est protégée par deux brevets.
Avec Nicolas Mistou (ayant soutenu sa thèse en juillet 2023), le chercheur Emile Perez s’est occupé de l’élaboration du procédé chimique et de la récupération des fibres, tandis que ses partanires du CIRIMAT ont pris en charge la caractérisation physique et mécanique des fibres recyclées ainsi que leur réintégration dans des nouveaux composites avec des résines époxy bio sourcées.
Emile explique :
« Il y a beaucoup de techniques pour recycler les matériaux composites, mais elles ont toutes de gros défauts. Elles sont soit peu respectueuses de l’environnement, soit très gourmandes en énergie et nécessitent des installations particulières.
Avec notre procédé, étant donné qu’on abime très peu les fibres, on peut envisager de les réutiliser après plusieurs recyclages. »
En effet, cette nouvelle méthode de recyclage chimique permet de récupérer des fibres de carbone démêlées dont les propriétés structurales atteignent 90% de celle du matériau initial, mais aussi de récupérer la résine époxy dépolymérisée, et tout cela en une seule réaction.
Le dispositif se base sur un système oxydant fonctionnant sous forme de bains, composé de carbonate de propylène en tant que solvant, d’eau oxygénée comme réactif et d’un catalyseur on ne peut plus commun : l’acide citrique. Contrairement aux méthodes concurrentes, aucun élément chimique utilisé ne s’avère toxique et les ingrédients cumulent également l’avantage d’être disponibles à un faible coût, rendant la perspective d’une industrialisation d’autant plus viable.
Réalisée en moins de 24h à pression ambiante et à 60°C, cette réaction n’est que peu énergivore comparée aux méthodes employées actuellement lors du recyclage de composites à base de fibre de carbone. Ce procédé, plus vertueux pour l’environnement, permet également le recyclage du solvant et du catalyseur, maximisant son efficacité tout en garantissant un minimum de déchets chimiques.
Les acteurs majeurs du secteur aéronautique ont fait part de leur enthousiasme quant à ce projet de recherche qui a été sélectionné dans le cadre de l’appel à manifestation d’intérêt économie circulaire 2023 « Avions commerciaux en fin de vie » lancé par Aerospace Valley, Airbus et Tarmac Aerosave. Il est également lauréat du prix Airbus « recyclage composite » pour cette même année.
Outre son impact sur des secteurs économiques et technologiques majeurs pour l’avenir, ce projet d’innovation ouvre également d’autres perspectives de recherche :
« Après cette première réussite, il est possible d’envisager la mise au point de procédés similaires pour d’autres matériaux, dont le recyclage est aujourd’hui difficile ou trop impactant sur l’environnement. » conclue Emile.
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